Aujourd’hui, le 1er avril 2024, elle aurait fêté ses 100 ans. Notre mère, grand-mère, tante et amie, partie le 9 août 2018, nous a laissé, sans aucun doute, une empreinte indélébile, non seulement par la part d’elle qu’elle a bien voulu montrer à la plupart d’entre nous, mais également par la première partie de sa vie jusqu’à son arrivée en Suisse el 1961, qu’elle a gardée secrètement cachée jusqu’à sa mort. Une autre vie dont elle ne voulait jamais parler car elle disait que c’était trop de mauvais souvenirs et de souffrances.
Quelques jours après son décès, entourée par ses deux fils, José-Fernando et Salva, ils découvrent une boîte en carton, une boîte de chocolats suisses, dans laquelle elle avait conservé de nombreux documents, lettres et photos de sa première vie. Une vie pleine de souvenirs intenses et surtout douloureux de la période terrible de la guerre civile espagnole qui se déroula de 1936 à 1939 et qui sera, en fait, le tremplin pour la Seconde Guerre mondiale.
À partir de tous ces documents discrètement conservés durant plus de 50 ans, commence une longue et passionnante investigation de la part de Salva qui, depuis enfant, assistait avec difficultés à la méllancolie dissimulée en silence d’Anita. Peu à peu, il découvre une vie pour le moins étonnante et passionnante qui aboutira par un très intéressant documentaire radiophonique d’une heure réalisé à la demande de Ricardo Aguilera, un célèbre réalisateur de la RNE (Radio Nacional de España).
Pas de film encore sur cette histoire et femme remarquable mais je vous propose une vidéo ci-dessous avec l’audio en espagnol de cette production radiophonique avec des sous-titres en français et en anglais. L’introduction à ce documentaire disait :
“Les protagonistes de l’histoire ne figurent pas toujours dans les manuels scolaires. Certains ont rejoint les rangs de ceux qui, dans l’anonymat, ont donné le meilleur d’eux-mêmes pour changer le cours de la vie ou de l’histoire. C’est le cas d’Ana Gutiérrez, la Tangerina, infatigable combattante pour la liberté aux heures les plus sombres de la nuit franquiste.
RNE Documents retrace la vie mouvementée de la Tangerina, une femme séduisante aux grands yeux noirs et profonds, aux lignes élégantes, dont l’acharnement à défendre ses idéaux fait que son histoire semble sortir d’un scénario de film. Née à Tanger, Ana Gutiérrez était déjà membre de la Jeunesse socialiste unifiée avant sa majorité. Elle a été arrêtée pour cela et l’a payé de deux ans de prison et d’exil.
Contrainte de quitter sa ville natale, elle se réfugie à Malaga, où elle poursuit son militantisme et multiplie les missions risquées pour le PCE : agent de liaison, espionne et propagandiste. Deux ans de prison supplémentaires sont le prix à payer pour son acharnement à poursuivre son combat. Une fois à la rue, La Tangerina retourne à la clandestinité, cette fois en soutenant le maquis dans les montagnes de l’Axarquia, à Malaga.
C’est là qu’elle vit une histoire d’amour intense avec Roberto, le chef légendaire de la guérilla antifranquiste. Pour elle, cela signifiait à nouveau deux ans de prison, mais pour Roberto, cela signifiait le mur. À sa sortie de prison, Ana, encore jeune, décide de reconstruire sa vie, s’exile en Suisse, se marie et fonde une famille. Elle y vit jusqu’à ce que, après sa retraite, elle revienne en Espagne et s’installe à Nerja avec son époux Fernando, dans une maison dont la terrasse donne sur les montagnes où elle a risqué sa vie pour ses idéaux.
Nous avons pu recréer les circonstances dans lesquelles Ana Gutiérrez, la Tangerina, a écrit son histoire de courage et de dévouement qui ne figure dans aucun livre.”
un site minimaliste est dédié à Ana avec quelques références et photos supplémentaires : https://ana-latangerina.com/